jeudi 28 janvier 2016

PRESSE: CHALLENGE du 26 janvier 2016 ...

La nouvelle est tombée hier. Et elle est bonne: pour la première fois depuis cinq ans, la production mondiale d’acier a baissé ! C’est l’Association mondiale de l’acier qui l’a annoncée. Certes, la baisse est encore timide (-2,8%). Et la Chine, grand responsable des surcapacités mondiales puisqu’elle produit la moitié des brames et coils stockés faute de demande, continue de les déverser à prix cassés dans les marchés occidentaux - les exportations d’acier chinois ont bondi de 22% en 2015 à 102 millions de tonnes. Il n’empêche. Cette nouvelle inespérée a permis au leader mondial du secteur, ArcelorMittal, de retrouver quelques couleurs en Bourse (+6%). Il était temps. Car depuis un an, son action a été divisée par trois. Et touche un plancher jamais atteint depuis la fusion de Mittal avec Arcelor, en 2006, à peine supérieur à trois euros! Une situation intenable qui relance les spéculations sur une nécessaire augmentation de capital à venir. La dernière – de quatre milliards de dollars – date seulement de 2013. Depuis, les signaux sont restés désespérément au rouge. La question des surcapacités qui ne sont pas sans rappeler le marasme qui touche aujourd’hui toute l’industrie pétrolière, avec la Chine dans le rôle de l’OPEP, n’est pas seule en cause. La sidérurgie européenne se heurte aussi à la politique de l’Union européenne. La politique environnementale d’une part. La Commission européenne a par ailleurs décidé l’été dernier, de revoir le système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre. Le nouvel objectif est fixé à -40% de CO2 en 2030 par rapport à 1990. Une décision qui coûterait, selon Aditya Mittal, le directeur général d’ArcelorMittal, « entre cinq et dix milliards d’euros au groupe, ce qui est parfaitement irréaliste ». D’autre part, la diplomatie économique de l’UE est également mise en cause. Certes, la Commission européenne tente d’imposer des mesures anti-dumping à certaines importations d’acier chinois. Mais en même temps, elle envisage d’accorder à la Chine le statut d’économie de marché, dans le cadre de l’OMC. Ce statut sortirait alors d’emblée tous les produits importés chinois du radar des droits de douane européens. Des milliers d'emplois disparaissent Une catastrophe pour les producteurs européens. De passage à Paris, le 5 octobre, le directeur général du sidérurgiste ArcelorMittal, Aditya Mittal n’avait pas voilé sa menace: « Si ça continue, nous serons obligés de reconsidérer notre empreinte industrielle en Europe. » Il était alors « trop tôt pour dire où et quand ». Rappelant que, sur le continent, il a l’embarras du choix: « Nous employons 100.000 personnes, sur 400 sites déployés dans 17 pays en Europe. » D’autres ont commencé à en tirer les conséquences. En l’espace de quelques semaines, cet automne, le groupe thaïlandais SSI supprimait 1.700 postes ; le britannique Caparo Industries étaient placé en redressement judiciaire menaçant 1.700 emplois ; et Tata Steel annonçait la suppression de 1.200 postes. Et depuis janvier, l’onde de choc arrive en France. Tata Steel cherche désormais aussi un repreneur pour son usine de rails à Hayange en Lorraine (450 salariés). Et le russe NLMK vient d’annoncer la fermeture de son site de Beautor dans l’Aisne (209 salariés). Quant à Mittal, à son tour, il vient de mettre sa menace à exécution. En fermant son site de production espagnol de Sestao, au Pays basque, d’une capacité de 1,5 million de tonnes, le géant mondial de l’acier veut faire passer le message à l’Union européenne : retenez-moi ou je fais un malheur ! ...