vendredi 12 avril 2013

CCE , CE du 12 avril 2013 :

Non, nous ne renonçons pas. On ne peut pas entériner la mise sous cocon des hauts fourneaux, car ce serait les condamner. Imaginons demain un rebond de la demande d’acier, on serait incapable d’y répondre. » Dans les propos de Jean-Marc Vécrin, de la CFDT, se concentrent toute l’amertume et la colère des syndicats du site d’ArcelorMittal de Florange. Le comité central d’entreprise d’A rcelorMittal Atlantique Lorraine (Amal ) a examiné, hier à Paris, l’ultime étape du processus d’information-consultation sur le projet industriel et commercial, avant l’ouverture de la négociation sociale qui définira les mesures d’accompagnement des 629 suppressions d’emploi avec arrêt de la filière liquide.

Cet arrêt qui passe par la mise sous cocon des deux hauts fourneaux mosellans, programmée pour la fin avril, « signe , selon Norbert Cima de FO, n i plus ni moins que la fin de la sidérurgie en Lorraine. On ne fait plus que de la métallurgie chez nous. Nous allons être encore plus tributaires des livraisons de brames de Dunkerque ». L’ensemble des syndicats a voté contre ce projet. Un rejet qui traduit une grosse inquiétude, notamment en cas de rebond de la demande d’acier en Europe. « Cela présente un risque pour l’approvisionnement de Florange », constate François Pagano, de la CFE/CGC, lequel estime « que techniquement, les hauts fourneaux lorrains sont déjà condamnés ». Il émet aussi des doutes sur la filière intégrée du packaging, « un projet entre Basse-Indre et Florange qui n’est pas mûr ». La CGT, plus que jamais, campe sur « l’incohérence de ce projet qui fera, pour le packaging, travailler Florange et Basse-Indre en flux tendu au détriment de la qualité de nos aciers ». CGT, CFDT et FO, pour faire reculer la stratégie de Mittal, appellent comme souvent, à la rescousse le gouvernement, voire Bruxelles.
« Florange compétitif »

« Nous sommes sur la bonne voie. En mars, le coût du coil sorti de Florange est très bon, il est meilleur que celui du site allemand de Brême. Notre projet industriel et commercial est fait pour remettre Florange à flot économiquement. Même l’expert du cabinet Secafi le reconnaît. Florange sera encore plus compétitif. » Henri-Pierre Orsoni, directeur général d’Amal et président du CCE, garde l’œil rivé sur les résultats économiques. « Certes, on ne produira plus d’acier, mais ici on le transforme. C’est en aval que l’on dégage de la valeur ajoutée. Je suis confiant. Ma priorité, c’est de reconstruire à Florange une entreprise compétitive qui assure son avenir. » Il ne voit pas rebondir la demande d’acier en Europe, qui est toujours en surcapacité de brames, mais croit plus que jamais aux mix-produits que Florange vend à ses clients. Sur le packaging, il entend l’inquiétude des syndicats. « Nous devons effectivement veiller à la qualité. Ce projet avance bien et doit nous permettre d’optimiser notre production de 400 000 à 650 000 t. Il se met en place progressivement à effectif égal à Florange et à Basse-Indre d’ici début 2014 », précise le directeur. Reste la fin de la filière liquide. « Sur les 629 personnes concernées, 206 sont déjà parties à la retraite. 301 ont été détachées sur des activités hors phase liquide, 122 restent affectées aux hauts fourneaux », souligne le directeur. R.L. du 12 avril 2013

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En veille depuis octobre 2011, les hauts fourneaux de Florange vont définitivement s'éteindre à partir de lundi. Un comité central d'entreprise d'ArcelorMittal jeudi 11 avril, puis un comité d'entreprise vendredi à Florange, doivent mettre un terme à cette chronique d'une mort annoncée. Délégué syndical FO, Frédéric Weber, se prépare à cette échéance.

Dans quel état d'esprit vous rendrez-vous au comité d'entreprise de vendredi ?

- C'est la fin du processus administratif. Dès le CE passé, le projet industriel était validé. A partir de lundi, la direction aura donc 12 semaines pour couper les fluides et tout clôturer. C'est la mise en bière de la filière liquide et des hauts fourneaux. Ça deviendra un cimetière pour six ans. Légalement, le sujet est clos. Ensuite, on entrera dans la négociation sociale qui devrait commencer fin avril.

Et comment s'annonce cette négociation ?

- Comme la CGT, FO condamne l'accord passé avec le gouvernement. Il n'est pas à la hauteur de ce qui était demandé. Nous ne sommes donc pas dans la commission du sous-préfet Marzorati [mise en place en décembre 2012 pour suivre la mise en oeuvre des engagements pris par le groupe ArcelorMittal, NDLR]. La CFDT y va parce qu'elle dit qu'elle essaie de travailler de l'intérieur : on verra bien.

Concernant la négociation sociale, nous sommes des élus responsables, on va y aller. Nous sommes obligés d'accepter la situation, même si nous la rejetons. Mais nous serons très exigeants sur les conditions sociales. ArcelorMittal doit maintenant assumer son choix.

Aujourd'hui, on sent des pressions pour que l'accord soit validé car si les négociations sociales n'aboutissent pas, cela remettrait en cause l'accord avec le gouvernement. Pour nous, les choses sont claires : l'avenir des gens de Florange se décidera à Florange. Il est hors de question que ce soient des gens extérieurs au site qui prennent la décision finale.

Vous pensez que tout a été fait pour sauver les hauts fourneaux ?

- Quand, fin novembre, le gouvernement aurait pu faire un acte fort avec la nationalisation temporaire et un repreneur, il a loupé le coche. Cela a été une erreur grave pour le site mais aussi pour la communication du gouvernement. Ce temps-là est passé. Aujourd'hui, on est dans le déploiement de l'accord. Tout n'est pas bon à jeter : il n'y a pas de licenciements forcés, pas de mobilités forcées. Tout cela va devoir s'acter dans la négociation sociale. On sent que ça ne va pas être simple.

Pour la région, cet arrêt, c'est la fin d'un symbole.

- En théorie, demain, c'est fini. Sauf si le président de la République vient annoncer la mise en place d'un système expérimental sur les ruines, mais c'est de la pure spéculation. On verra. Aujourd'hui, c'est la fin de la sidérurgie Lorraine. Les premières forges d'Hayange datent du XIVe siècle… C'est la fin d'une époque. Mais ce n'est pas trop le problème. Si on peut donner des perspectives aux gens derrières, c'est autre chose. Or le marasme économique est tel qu'on se demande combien de ceux qui vont perdre leur emploi en retrouveront un dans les mois à venir. Nous nous battons simplement pour sauver ce qui peut l'être. On ne vient pas pour acquérir des droits nouveaux, on use notre énergie pour essayer de maintenir au mieux l'existant. Ce n'est plus du tout la même philosophie mais on le fait, c'est notre devoir.

Propos recueillis par Louis Morice - Le Nouvel Observateur

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